Les délices de Tokyo

Les délices de TokyoSi je devais choisir un pays qui me fait particulièrement rêver, le Japon arrive en tête. Je ferais coïncider mon voyage avec Hanani, la fête qui célèbre la floraison des cerisiers, fête qui symbolise le printemps et le renouveau. Je prendrais le temps, observatrice du moment, des gens et mangerais un bento en contemplant ces magnifiques arbres renaissant.
La lecture des délices de Tokyo nous emmène à l’ombre de ces cerisiers et des quatres saisons. On entame un roman initiatique. Un roman doux et amer.

Un gérant d’échoppe désabusé et légèrement suicidaire confectionne tièdement des Dorayaki ces deux crêpes dorées fourrées de An une pâte de haricots rouges sucrée.
Jour après jour, il est là, derrière sa plaque de cuisson, sans vraiment y être. Personnage amorphe à la recherche de la moindre économie d’énergie, un travailleur qui s’enfonce dans un quotidien sans fierté, jusqu’à l’arrivée d’une vieille dame au chapeau bleu et aux doigts déformés surgissant de sous un cerisier en fleur. Elle cherche du travail.

Une rencontre marquante qui amènera «Patron» sakuraà prendre conscience de l’importance du travail bien fait et du respect des produits que la nature nous offre, de la puissance des préjugés face au risque de maladie et de contamination, la conscience que nous sommes plus fort à plusieurs que tout seul pour affronter les difficultés de la vie. Un combat de vie que l’on ressent au fil des mots.

Un livre qui se lit rapidement toutefois, qui aborde plusieurs autres sujets de société comme le risque de l’uniformisation du goût à cause du monopole des produits issus de agroalimentaire, la mort des petits commerces de quartier, on retrouve les thèmes de la vieillesse et de la solitude. L’auteur nous amène aussi vers des paysages plus colorés en nous parlant de sagesse, de réalisation de soi à travers un métier ou un loisir qui nous passionne, d’amitié, d’enseignement et du pouvoir régénérateur de la nature. Une lecture appréciée.

Le livre a été adapté au cinéma en 2015 par Naomi Kawase.

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Un extrait pour donner la couleur

Sentarô finit par se laisser fasciner par les haricots dans la bassine en cuivre. Les grains frémissaient dans l’eau de cuisson. Pas un seul n’avait éclaté.
Il restait encore un peu de liquide lorsque Tokue éteignit le gaz et posa une planche à découper sur le savari. D’après elle, c’était ainsi qu’on laissait reposer les haricots. Toutes ces techniques étaient inconnues de Sentarô. «C’est compliqué, tout ça», laissa-t-il échapper; ce à quoi Tokue répondit: «C’est une question de courtoisie.
– Pour la clientèle ?

   – Non. Pour les haricots.
   – Les haricots ?
   – Oui, puisqu’ils ont fait l’effort de venir du Canada.» (page 35-36)

Les délices de Tokyo de Naomi Kawase voulez-vous un dorayaki (2)

 

Quelques notes de l’éditeur (4e de couverture) :
Pour payer ses dettes, Sentarô vend des gâteaux. Il accepte d’embaucher Tokue experte dans la fabrication de an, galette à base de haricots rouges. Mais la rumeur selon laquelle la vieille femme aurait eu la lèpre étant jeune, met la boutique en péril. Sentarô devra agir pour sauver son commerce.

À propos de l’auteur : durian sukegawa
Durian Sukegawa est poète, écrivain et clown, diplômé de philosophie et de l’École de pâtisserie du Japon. D’abord scénariste, il fonde en 1990 la Société des poètes qui hurlent, dont les performances alliant lecture de poèmes et musique punk défraient la chronique.
De 1995 à 2000, il anime sur les ondes d’une radio nationale une émission nocturne plébiscitée par les collégiens et les lycéens.

Titre : Les délices de Tokyo
Auteur : Durian Sukegawa
Éditeur : Albin Michel
Date de parution : Février 2016
Traduction: Myriam Dartois-Ako

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La dynastie des Chevallier

 Les petits plaisirs se démocratisent !

L’auteure, Emmanuelle Friedmann est historienne et se passionne pour l’histoire sociale, dont la saga d’une famille de chocolatiers, Les Chevallier à la fin du 19e siècle menant à la naissance d’un produit, le chocolat.

Apprenti chez un apothicaire, Victor, le premier de la dynastie expérimente des médicaments à partir de la fève de cacao, utilisée que pour ses vertus thérapeutiques. En secret, il apprécie le goût suave de cette fève. Afin de partager son plaisir, il entreprend la fabrication de petites plaquettes de morceaux détachables – ça vous dit quelques chose n’est-ce pas !! Pour satisfaire à la demande, il décide de construire une fabrique de chocolat. Et tout autour, il créé une cité ouvrière permettant aux familles de vivre décemment en mettant à leur disposition des maisons individuelles à bas prix. Puis il installe une école gratuite et obligatoire jusqu’à l’âge de 12 ans.
Même si les personnages de la famille Chevallier sont un produit de l’imaginaire de l’auteure, ils nous permettent de vivre l’ensemble des événements marquants de ce siècle, notamment la Révolution industrielle, le développement du chemin de fer, l’apparition de l’automobile, l’exposition universelle de Paris en 1900. On traverse la première grande guerre menant à la mobilisation de tous les hommes remplacés par les femmes comme ouvrières à la Chocolaterie. On assiste également à la naissance de la publicité et en finale, le krack boursier alors que l’expansion de l’entreprise commence  à prendre forme en 1929, du côté de l’Amérique.

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Non seulement l’auteure nous raconte les débuts de l’industrialisation du chocolat, mais également les innovations pour déguster le cacao… D’ailleurs en exergue, on y trouve quelques recettes dont La pintade au cacao que je me promets bien d’essayer.

Un extrait pour donner la couleur :

Un matin, alors que le petit déjeuner était servi dans la salle à manger, Jackie, troublé par la vue de Madeleine qui venait de lui apporter son bol de lait chaud, laissa tomber un morceau de chocolat dans le fond de son bol.
Le temps qu’il attrape sa cuillère pour le récupérer, le chocolat avait partiellement fondu. Il saisit le morceau de chocolat et l’étala sur une tranche de pain qui était dans son assiette. Louis qui n’avait rien vu du manège de son fils, eut soudain les narines chatouillées par un parfum de chocolat. «Grand-père, c’est délicieux le chocolat tartiné. Goûtez! Il faut que nous en fabriquions ! » (p. 116)

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Quelques notes de l’éditeur (4e de couverture) :

Rythmée par les innovations des pionniers du chocolat. De la Commune au krach boursier de 1929, une saga familiale gourmande, trépidante, pleine de passions et de déchirements, portée par le souffle de la grande Histoire

À propos de l’auteur : FRIEDMANN Emmanuelle

Titulaire d’un diplôme en histoire économique et sociale, Emmanuelle Friedmann est journaliste et auteure de plusieurs livres. Elle réside à Paris.

 

Titre : La dynastie des Chevallier
Auteur : Emmanuelle FRIEDMANN
Éditeur : Calmann-Lévy
Date de parution : 2013

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